Départ à l'aube du refuge du Requin, pour aller, lestés de sacs et de cordes, dans la face Nord de la Dent du Géant. Après observation à la longue vue, dominique Feray et moi, sommes plein d'espoir... le quartz blanc amorphe qui zèbre la face rocheuse doit mesurer un mètre de large. Traversée de la Mer de Glace puis du glacier des Périades; nous contournons une grosse rimaye et attaquons allègrement un long entonnoir de glace "PF! PF!". Nous débouchons sur une imposante pente, en rochers très délités recouverte de neige
     Dans un tel terrain, nous avons à peine la place pour poser le crampon en entier. Par habitude, nous ne sommes pas encordés, la chute de l'un entraînant l'autre. Finalement, à bout de souffle, nous nous auto-assurons au pied de l'imposante muraille granitique verticale.
     Rien rien! pas la moindre pointe de cristal. Un instant nous "l'avons mauvaise". Mais, philosophes et, sachant que le temps presse, nous nous glissons le long du rappel en rigolant,
noyés sous une cascade de neige poudreuse. Sitôt les pieds sur le glacier, encordement, et c'est une course folle pour nous abriter sous un îlot rocheux car, au dessus, il y a un autre glacier suspendu et "tout poudre"!
     Nous repartons aussitôt. Dominique, qui aime aller devant, passe dans un trou, et a la désagréable impression de pédaler dans le vide. Dans ces conditions vous savez trop bien pourquoi vous êtes encordés. Un véritable sprint final nous amène au dessus du couloir de glace, impressionnant!
     "Aller! on pose nos deux cordes en simple et on se casse!". C'est à mon tour, bloqué "au double noeud de pécheur", je lève la tête. Au dessus, quarante centimètres de neige poudreuse nous surplombe, auréolée d'un magnifique soleil.
     "Y'a pas... il faut y aller!". En bout de corde, au beau milieu de ce vertigineux toboggan de glace, une vilaine crevasse. "Y'a pas... il faut y aller!". Je singe drôlement les pas de l'araignée "Oh là là tequila!". Finalement, les grosses difficultés sont passées, je respire et "crac!" mon pied droit file dans un trou, roulade de parachutiste et, peu après, dégoulinant de sueur; nous nous serrons joyeusement la main.
             "J'appellerais cette journée: douze heures de terrain miné!" s'exclame Dominique.
                      Et à part nous "Encore une journée de foutue"

(Titre inspiré d'une chanson de J. Higelin)

 Serge Bladet dit "Sergio" - Eté 1996 

 

 

 

 

 

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